Je vous partage un texte qui a été publié sur la page Facebook de Un rat - Une vie - Une histoire Belgique.
Certain(e)s d'entre vous l'on déjà lu sur la page des Ratounes, dont je la met ici pour ceux/celles qui n'ont pas de compte Facebook.
Attention âmes sensibles s'abstenir, et préparez vos mouchoirs
Comment t’as pu ?
Quand j’étais petit, j’étais la star,tu me prenais sur tes genoux, on regardait des films ensembles, j’étais près de toi quand tu voulais jouer, j’étais près de toi lorsque tu pleurais, lorsque tu faisais ta sieste… Tu disais à tout le monde que j’étais mignon avec mes très grandes oreilles et mon petit corps, que j’étais doux, je te faisais même des bisous sur les mains, tu adorais ça.
J’ai grandi, tu n’avais pas prévu que j’allais avoir une longue queue et de grandes dents, que j’allais changer.
Tu as rencontré papa, il ne m’aimait pas, il disait que j’étais laid et que je sentais mauvais, tu me sortais mais beaucoup moins souvent car il n’aimait pas quand j’étais là. Quand tes amis venaient ils disaient que j’avais changé, que j’étais gros et beaucoup moins mignon.
Tu m’as changé de pièce, j’étais dans le salon mais je rongeais mes barreaux et ça t’ennuyait, je faisais trop de bruit, tu ne comprenais pas que j’avais besoin de toi et puis j’étais dangereux pour le bébé qui allait arriver, papa disait que j’étais porteur de maladies, mais je trouvais que j’allais bien, j’étais en pleine forme, je ne comprenais pas. Tu m’as mis dans le bureau, j’étais isolé, je ne te voyais plus… Tu passais une fois par jour pour me nourrir. Je n’avais pas de copain, seul, j’étais seul.
J’ai fêté mon premier anniversaire ! Un an de vie, le tiers de ma vie, mais je n’ai pas eu de cadeaux ni même de câlins.
Après quelques mois, tu es venue toute souriante et tu as voulu me prendre dans tes bras, bébé était né, tu étais heureuse. Mais tu as été si vite ! Après tant de temps sans me prendre sur toi, sans caresses et sans câlins, j’ai été bouleversé, j’étais terrorisé, qu’allais-tu me faire ? Je me suis défendu, je t’ai mordu. Je n’ai pas voulu, je n’ai pas fait exprès, mais tu ne me comprenais pas… Tu ne comprenais pas que je n’avais plus l’habitude… Tu as crié ! Papa est arrivé et m’a appelé « la sale bête », j’étais triste, j’aurai aimé un copain pour qu’il me réconforte mais j’étais seul… Tu es partie, tu m’as laissé seul,encore. J’étais fâché sur toi, et tu étais fâchée sur moi. Comment allait-on régler ça ?
La vie a repris son cours, tu passais me voir, tu me donnais toujours la même chose, la même quantité de nourriture, jour après jour.
2ème anniversaire, seul.
Vous êtes arrivés dans le bureau,près de ma cage, vous vous disputiez… A cause de moi… J’ai entendu mon nom et «la sale bête » à plusieurs reprises. « Tu ne peux pas le garder », « Il ne sert à rien » « qui va le garder pendant nos vacances ? »
Tu n’osais plus me toucher mais tu as ouvert ma cage, je suis resté sage, je t’ai laissé me prendre dans tes bras, j’avais un peu peur mais je n’ai pas bougé, tu m’as mis dans ma petite boîte de transport que tu avais acheté lorsque tu m’avais acheté en animalerie, j’étais petit, mais j’ai grandis, je me sens serré dans cette petite boite. Tu m’as emmené avec toi dans la voiture, on partait en voyage, je ne voyais pas grand-chose dans ma boîte. Tu t’es arrêté près d’une rivière, tu as ouvert ma boîte et tu m’as chuchoté « ici est ta place, ton milieu naturel, tu seras bien», tu m’as poussé, je t’ai regardé, et tu es partie sans même un au revoir, tu m’as laissé seul dans ce vaste espace, je ne connaissais pas l’eau, le truc vert sur lequel je marchais.
Je suis resté deux jours sans manger,je ne trouvais pas mes graines, ni de fruits, il faisait froid et les arbres n’avaient plus de feuilles. Je suis resté dans un petit coin à l’abri du vent et de la pluie. J’avais soif, j’avais faim et froid.
Je dormais, je me réchauffais en pensant à nos moments lorsque j’étais petit, les gratouilles, les câlins. Je suis resté longtemps ici, j’ai pensé à toi, souvent. Il faisait jour et puis nuit, les jours sont passés, je me sentais faible, ma peau me démangeait, j’avais faim.
Je devais trouver de quoi me nourrir,je me suis aventuré dans les champs, j’étais perdu… Je ne suis pas fait pour ce monde. Au loin, j’ai aperçu une dame, avec son enfant, il mangeait des tartines, j’aime bien les tartines moi ! Je les ai suivi et je ramassais les petites miettes qu’il laissait tomber, mais je n’avais pas prévu qu’ils avaient un chien ! Il m’a vu, il m’a aboyé dessus ! Il m’a fait très peur, je me suis mis en boule, je n’avais pas la force de courir. La dame m’a pris dans ses bras, tu sais, elle te ressemblait, elle avait de grands yeux ronds et une petite
bouche.
Elle a chuchoté « pauvre petit, que fais-tu là ? », elle m’a emmené chez elle et m’a donné de la nourriture et de l’eau fraîche, elle m’a mis dans une caisse en carton mais je n’avais plus de force, ma peau me grattait, mes oreilles me faisaient mal, je respirais mal, je n’ai rien mangé.
Elle m’a emmené dans un endroit que je n’avais jamais vu, ça sentait le désinfectant, je n’aimais pas cette odeur. J’éternuais, je respirais par la bouche, mon nez était encombré, j’étais maigre.
Un monsieur m’a pris et m’a mis un drôle d’objet sur le ventre, je pense qu’il écoutait mon cœur, il a regardé mes oreilles, mes dents, mes pattes, mes yeux…
Je l’ai entendu dire, tristement, en me regardant « ce petit n’a aucune chance de survie, il a des poux, ils l’ont affaibli, il respire très mal, les médicaments ne feront pas effet, je suis désolé, je ne peux rien faire… ». La dame a pris la décision de me laisser partir.
Tu vois, maman, tu t’es trompée, ce n’était pas ma place, tu m’as laissé seul, tu m’as abandonné, tu n’as pas essayé mais malgré tout je t’aime toujours…